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EDITO

Par Valérie Dreyfuss, déléguée
générale du Laboratoire de la
Mobilité inclusive

« Qu’il s’agisse de l’accès à l’emploi, l’insertion sociale et professionnelle, la santé, le logement, l’éducation et la culture, la mobilité conditionne l’efficacité des autres politiques publiques, surtout pour les habitants des zones rurales, périurbaines ou des quartiers sensibles. »

Valérie Dreyfuss, Déléguée générale du LMI

La fracture entre les métropoles, les centres-villes, les périphéries urbaines et rurales ne cesse de croître.
Des territoires entiers sont devenus, à bien des égards, de véritables déserts où les populations se heurtent à une assignation à résidence. Un piège dangereux car, on le sait, l’ancrage géographique restreint drastiquement le champ des études et des
orientations professionnelles et l’accès aux services de la vie quotidienne. Or, au centre des inégalités criantes, la mobilité quotidienne comme condition d’insertion sociale et professionnelle paraît être un des vecteurs essentiels. Le constat est sans appel : 3 à 4 Français sur 10 déclarent avoir déjà renoncé ou repoussé à plus tard, par défaut de mobilité, certains de leurs déplacements (cf. sondage p.6-7).

Parce que les Français ne sont pas égaux face à la mobilité, parce que l’accès à la mobilité est reconnu comme un facteur clé de l’insertion sociale et professionnelle des personnes fragiles, parce que nous pensons qu’il faut appréhender la mobilité dans sa globalité, parce que défendre une mobilité inclusive, c’est engager un changement de paradigme pour une mobilité conçue pour tous et accessible à tous. Le Laboratoire de la Mobilité inclusive a défendu des mesures simples, innovantes, au service de tous lors des Assises : développer un véritable apprentissage de la mobilité en France pour tous, à tous âges et tout au long de la vie, adapter les outils et les services numériques, favoriser les plates-formes de mobilité pour un accompagnement personnalisé, encourager les innovations et rendre les aides à la mobilité plus accessibles… Toutes ces avancées devraient être prises en compte dans le cadre de la LOM (loi d’orientation des mobilités) promise pour cette année.

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Philosophe politique, Cynthia Fleury est professeur associé à l’École nationale supérieure des mines de Paris et dirige également la chaire de philosophie à l’hôpital Sainte-Anne.

État des lieux, obstacles, pistes d’amélioration, Cynthia Fleury, philosophe politique et Éric Le Breton, sociologue, croisent leurs regards sur la mobilité d’aujourd’hui et de demain. Rencontres.

Pourquoi vous intéresser à la mobilité ?
La mobilité comme valeur cardinale est au coeur d’une dynamique de potentialités. Elle est la perspective d’une meilleure vie relationnelle, familiale, personnelle et professionnelle. Elle n’est pas seulement une affaire de transports car il ne s’agit plus de posséder tel ou tel moyen de déplacement, mais d’avoir accès à telle ou telle possibilité de mobilité, facile, ordinaire, adaptée à ses besoins et en temps réel. On comprend pourquoi, la fluidité des transports publics et la mise en place de plateformes facilitant l’agencement des mobilités individuelles, type covoiturage, deviennent désormais incontournables.

Montée des inégalités, aggravation de la fracture territoriale,  pourquoi la vision pourtant égalitariste des transports par les pouvoirs publics, est-elle en échec ?
La montée des inégalités ne se limite pas à la seule mobilité des citoyens, elle touche tous les services publics. La raréfaction des moyens, la crise budgétaire ainsi que la perte du sentiment de solidarité collective expliquent en grande partie ces fractures sociales mais aussi territoriales. Car en polarisant les moyens sur les métropoles et les grandes villes, on a créé, certes, des centres d’attractivité mais on a fabriqué en parallèle des déserts territoriaux. De fait, plus les personnes sont vulnérables, moins leur mobilité est aisée et inversement. Un paradoxe.

La mobilité est vecteur d’aggravation des inégalités: qu’en est-il du modèle français de justice sociale ? Est-il à bout de souffle ?
Il y a une précarisation forte des populations, un compromis social en délitement, donc oui la culture solidaire s’effrite, ce qui est classique dans un monde en précarisation qui n’arrive plus tellement à concevoir une approche d’intérêt général. Mais parallèlement, il y a aussi quantité de collectifs qui défendent des approches plus solidaires et d’empowerment. Les deux tendances sont vraies, la modernité fait d’ailleurs souvent coexister des approches contradictoires.

Comment faire pour que tous les acteurs travaillent ensemble à une mobilité plus inclusive ? 
La prise en compte de la question de la mobilité demande une reterritorialisation de la question pour essayer d’instruire une situation de la façon la plus efficace possible. La considérer comme un enjeu de responsabilité sociale de l’entreprise, c’est un premier pas essentiel. D’un point de vue politique, tout enjeu, climatique, énergétique, social ou économique, est toujours au cœur d’un conflit de légitimités. Arbitrer entre ces légitimités n’a rien de spécifique à la question de la mobilité.

Quelles sont vos recommandations ?
Il est urgent de sortir de cette polarisation par le centre et de tous ces transports qui transitent par le cœur des villes. Il faut déployer des offres ciblées et adaptées aux besoins des populations et non pas l’inverse

Éric Le Breton est sociologue à l’université Rennes 2.

Le paysage de la mobilité s’est considérablement transformé sur les 50 dernières années ; quels sont les changements majeurs ?
Sur cette échelle temps finalement très courte, on constate deux changements majeurs : le premier, est l’étalement des villes. Dans les années 60, elles étaient très denses et resserrées autour du centre. Les Français se déplaçaient à pied pour répondre à leurs besoins au quotidien. D’ailleurs, chaque quartier était autonome disposant de son école, de ses commerces, de ses habitations et même de ses emplois. L’autre transformation, de taille, est la segmentation du travail. En quelques décennies, les emplois stables, bien rémunérés, se sont peu à peu transformés en emplois précaires, mal rémunérés. Lorsque l’on cumule les deux bouleversements, on voit bien comment la capacité de chacun à se déplacer est devenue la variable d’ajustement entre les espaces de vie et les temps de vie et de travail. Or, toutes les catégories sociales n’ont pas les mêmes capacités à faire face aux injonctions de la mobilité.

Pourtant en cinquante ans, on a créé des transports publics, construit des autoroutes, ouvert des lignes de train… bref, déployé une offre plus large ?
Effectivement. Des bus, des trains, des tramways circulent. On a construit de belles gares, de beaux lieux mouvants, mais toutes ces innovations sont concentrées au centre des agglomérations. Passé la première couronne, excepté en Ile-de-France, les offres de transports sont quasi inexistantes. On habille les centres-villes comme des faire-valoir pour attirer les touristes. Du coup, si la part de la voiture baisse dans tous les centres villes, elle continue de progresser dans toutes les périphéries.

Quelles solutions envisagez-vous pour ces « empêchés » ?
En termes d’innovation sur le terrain, les réponses émergent. On constate une montée en puissance des bonnes volontés, des intelligences, des initiatives privées et publiques dans le milieu rural et dans les zones périurbaines. Mais les inégalités ont la peau dure. Des agglomérations comme Bordeaux ou Toulouse captent l’essentiel du développement urbain alors que bon nombre de villes sont devenues des déserts inaccessibles. Jouer sur l’aménagement du territoire, en faisant venir les entreprises dans les villes endormies, en construisant des logements et en ouvrant des écoles…serait la voie royale. Sauf que l’on a pris le chemin inverse en concentrant les moyens sur les métropoles. Et parier sur l’aménagement prend beaucoup de temps. Le pari n’est pourtant pas perdu grâce à l’investissement des élus, à la multiplication des bonnes pratiques, à l’engagement des associations. Ensemble, ils parviennent à faire émerger des solutions innovantes adaptées aux besoins de tous. À ce titre, la loi sur la mobilité tombe à pic parce qu’elle va donner une structure et du confort aux actions isolées.

Quel rôle pourrait avoir le digital ?
Pour l’heure, aucun et pour encore longtemps. Car le digital suppose des moyens et des compétences. En matière de mobilité, les deux font cruellement défaut. Pourtant oui, le digital serait une chance pour la mobilité inclusive.

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LES FRANÇAIS CONSIDERENT QUE LA CAPACITÉ A SE DÉPLACER FACILEMENT CONDITIONNE LA QUALITÉ DE VIE AU QUOTIDIEN

Le Laboratoire de la Mobilité inclusive, Think Tank, publie à l’occasion des  5èmes Rencontres de  la  Mobilité une enquête inédite « La mobilité et l’accès des Français aux  services  de  la  vie  quotidienne ».  Ce sondage réalisé par l’Institut Elabe dresse un état des lieux, identifie les obstacles, mais aussi les pistes d’amélioration prioritaires qu’attendent les Français pour permettre à tous d’accéder en toute liberté et autonomie aux services du  quotidien.

La mobilité, un besoin universel souvent contrarié

Se déplacer facilement, une condition indispensable pour la qualité de vie au quotidien, c’est ce qu’estiment 65 % des Français interrogés par l’Institut Elabe, quels que soient leur âge, leur lieu de résidence ou leur habitation. « L’enquête révèle que la mobilité est un sujet universel, puisque tous les Français, et pas seulement les plus fragiles, se sentent concernés », commente Valérie Dreyfuss, déléguée générale du Laboratoire de la Mobilité inclusive (LMI).
Pourtant, les Français font souvent l’expérience d’une mobilité entravée, contrainte, empêchée. 1 Français sur 3 estime être contraint dans ses déplacements ou modes de transport pour faire des démarches administratives (44 %), accéder à des loisirs ou faire une sortie culturelle (41 %), se rendre à un rendez-vous médical (37 %), faire ses courses alimentaires (35 %) ou pratiquer une activité physique ou sportive (26 %). « Il est impensable, au 21ème siècle, à l’ère de la consommation et des progrès techniques, que remplir son réfrigérateur puisse encore poser un problème pour 26 % des personnes interrogées », s’alarme Valérie Dreyfuss.
Au-delà de la contrainte perçue, 3 à 4 Français sur 10 déclarent avoir déjà repoussé à plus tard ou renoncé (par défaut de mobilité) à accéder à des loisirs ou faire une sortie culturelle (41 %), faire des démarches administratives (36 %), se rendre à un rendez-vous médical (30 %), pratiquer une activité physique ou sportive (29 %) ou faire ses courses alimentaires (26 %).
Ce sont les usagers réguliers des transports en commun, mais également les personnes non équipées d’une voiture qui sont les plus contraints. Sans surprise, les empêchés de la mobilité sont en priorité les jeunes (18-25 ans), les actifs (cadres et employés) plus que les retraités. Fait surprenant : ce sont les habitants de l’agglomération parisienne qui déclarent plus largement que la moyenne avoir déjà renoncé à des loisirs (54 %). « 37 % des Français renoncent à rendre visite à leur famille par manque de moyens de transports.
Dans une société vieillissante où le lien familial constitue une ressource essentielle pour les plus fragiles, il est temps de se poser la question vers quelle société souhaitons aller », s’insurge Valérie Dreyfuss.

La mobilité, un révélateur de fragilités (notamment cognitives)

29 % des personnes interrogées ont déjà renoncé à des déplacements par crainte de se perdre et 22 % par incapacité à construire son itinéraire. « La mobilité n’est pas uniquement une affaire d’offre de transports. C’est aussi la capacité à pouvoir comprendre le système de transports en place ; ce qui renvoie aux compétences cognitives », commentent les experts du sondage.

« Voilà pourquoi l’apprentissage  et l’accompagnement des plus vulnérables sont des actions indispensables d’émancipation individuelle et d’inclusion sociale et professionnelle. C’est la vision que porte le Laboratoire de la Mobilité inclusive auprès des pouvoirs publics depuis maintenant plusieurs années », ajoute Valérie Dreyfuss.

Face à la multitude de l’offre (bus, tramway, métro, RER…), ce sont les  habitants des  zones les plus urbaines (agglomération parisienne et agglomérations de plus de 100  000  habitants) qui semblent être les plus en difficulté. 32 % des résidents de l’agglomération  parisienne déclarent avoir renoncé à se rendre dans un lieu inconnu par incapacité à  construire son itinéraire. « L’offre est tellement vaste et les transformations sont si rapides que les populations des zones urbaines ont besoin d’être accompagnées pour qu’à terme elles gagnent en autonomie. C’est aussi l’enjeu du multimodal et la capacité de tous à s’en saisir », insiste Valérie Dreyfuss.

Les freins à la mobilité, accélérateurs d’isolement social

Conséquence au renoncement à se déplacer : l’isolement. 37 % des Français affirment qu’ils ont déjà renoncé à rendre visite à  leur famille car ils n’avaient pas accès à un moyen de transport pour  s’y  rendre.  Un  chiffre quasiment aussi important lorsqu’il s’agit de passer du temps avec ses amis (34 %).
L’entrave au lien social pour cause  de  mobilité est  plus  largement  vécue  par  les  non-équipés de voiture (54/59 %), les usagers réguliers des transports en  commun  (48/60  %),  les  plus jeunes (58/59 %) et les actifs, notamment cadres (38/46 %) et employés (42/44 %). Le taux de renoncement atteint 46/47 %  auprès  des habitants de l’agglomération parisienne, soit 10/12 points de plus que la  moyenne  des Français.

Les freins à la mobilité, générateurs de bouleversement du mode de vie

Pour pallier les difficultés  de  déplacement, bon nombre de Français interrogés songent à changer de mode de vie. 30 % des actifs en emploi envisagent le télétravail, le temps partiel, arrêter de travailler ou changer de poste. Le désir de changement est nettement plus fort chez les jeunes actifs (39 % et 38 % auprès des 25-34 ans) et des  habitants  des zones urbaines (33 % dans les villes de plus de 100 000 habitants et 35/41 % dans l’agglomération parisienne). 23 % des Français ont même déjà envisagé de déménager pour se rapprocher de leurs centres d’activité.

Mobilité, des pistes de solutions possibles

Afin de  lever  les  freins,   les   Français interrogés évoquent tout d’abord l’aspect financier.  En  effet,  53   %   des  Français  (soit plus d’un sur deux), quels que soient l’âge, la profession ou le lieu de  résidence,  suggèrent pour améliorer   leurs   déplacements   un   coût de transport moins cher (essence, ticket de transport,  assurance,  etc.).  Ensuite,  ils suggèrent  un  réseau   de   transports   en commun avec des horaires ou des fréquences mieux adaptés à leur quotidien  (35  %),  mais aussi  l’acquisition  d’un véhicule  qui   va   de pair avec  l’obtention  du  permis  de  conduire  : 20 % des Français évoquent le besoin d’un véhicule  (supplémentaire  ou   1er   véhicule) pour améliorer leur mobilité au quotidien.
Cette solution est nettement plus citée parmi les jeunes (28 % des 18-24 ans et 23 % des 25-34 ans).

Méthodologie
Cette étude a été conduite auprès d’un échantillon de 1 000 individus, représentatif des résidents de la France métropolitaine,âgés de 18 ans et plus. Représentativité assurée par la méthode des quotas (sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle du répondant, région et catégorie d’agglomération). 7 Interrogation online les 1er et 2 mai 2018.

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« Pour les populations fragiles, tout est plus loin, plus cher et plus lent. La faiblesse de leurs revenus entame leur capacité de mobilité. Et comme un cercle vicieux, ces freins contribuent à leur tour à les maintenir dans leur précarité. »
Valérie Dreyfuss,
déléguée générale du LMI

Se rendre le matin au travail ou chez son médecin, faire les courses, rejoindre son école ou son université, retrouver sa famille ou ses amis… Tous ces déplacements simples de la vie quotidienne ne sont pas accessibles à tous.
Force est de constater qu’aujourd’hui non seulement les offres de mobilité sont inégalement distribuées mais que le potentiel à se mouvoir, qu’il s’agisse d’accéder à l’emploi ou à l’organisation de la vie quotidienne, n’est pas le même pour tous les citoyens. De fait, un Français sur trois est en difficulté de mobilité et menacé d’exclusion. Chez les populations les plus jeunes et socialement les plus fragiles – faible niveau de diplôme et faibles revenus –, ce constat est encore plus marquant : une personne en insertion sur deux a déjà refusé un emploi ou une formation pour des problèmes de mobilité et 28 % ont même abandonné un emploi ou une formation en cours. Pour ce qui est des personnes reconnues handicapées, 21 % d’entre elles étaient au chômage en 2015, souvent parce que le permis de conduire leur est inaccessible (deux fois plus que la moyenne nationale).

Quant aux seniors, ce n’est pas moins de 5 millions d’individus qui affirment ne pas sortir de chez eux parfois pendant 24 heures d’affilée, soit 1 personne sur 4. L’inégalité en matière de mobilité est aussi un fait territorial. Selon la densité de population des communes, les temps d’accès aux commerces, services de soins de première nécessité, établissements d’enseignement, ou encore services pour les personnes âgées ou les jeunes enfants, varient du simple au triple.

« Les freins à la mobilité ne sont pas seulement économiques et matériels, ils sont aussi sociaux, psychosociaux,
organisationnels, géographiques. »

Valérie Dreyfuss,
déléguée générale du LMI

Le droit à la mobilité, une liberté fondamentale pour plus d’égalité

Pourtant, l’exigence sociale de mobilité a suscité l’émergence d’un droit au transport, défini comme l’accès aux transports en commun, puis d’un droit à la mobilité comme l’accès de l’individu à des activités quotidiennes. Ces droits ont gagné en légitimité car ils conditionnent la plupart des autres droits socio-économiques (se nourrir, travailler, se soigner, s’éduquer, se cultiver, avoir une vie sociale et politique). Mais qu’en est-il de ces droits pour les populations vulnérables, et tout particulièrement celles qui sont éloignées des centres urbains alors que nos sociétés sont de plus en plus dispersées spatialement ?

Si être mobile suppose de disposer de moyens de transport et pouvoir s’en servir, se déplacer de façon autonome, disposer à proximité de son domicile des services, commerces ou bassins d’emploi, pouvoir faire garder ses enfants, pouvoir lire un plan de transports, maîtriser le Français, l’un de ces moyens ou l’une de ces compétences manque, alors le risque d’être assigné à résidence grandit dangereusement.

« La mobilité est un droit mais relève aussi d’une compétence clé dans les parcours de vie. »

Valérie Dreyfuss,
déléguée générale du LMI

Favoriser une mobilité inclusive, le combat du Laboratoire de la Mobilité Inclusive
Dans une société construite sur le mouvement de tout et de tous, l’accès aux aptitudes et aux moyens nécessaires à ces déplacements est une aspiration légitime et une condition majeure pour une insertion ou réinsertion sociale. Cette conception est au cœur de la mobilité inclusive. La favoriser consiste à proposer des solutions de mobilité conçues pour tous et avec tous, de l’apprentissage du déplacement à sa
réalisation.
Sont en particulier concernées les catégories de population les plus fragiles : personnes à faibles revenus, demandeurs d’emploi, jeunes ruraux ou des quartiers sensibles, personnes âgées, personnes à mobilité réduite…

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« Au regard des enjeux économiques, sociaux et environnementaux, la mobilité est désormais, plus que jamais, le centre des politiques publiques que ce soit à l’échelle locale, régionale, nationale ou internationale. »

Valérie Dreyfuss,
déléguée générale du LMI

Répondre aux enjeux de la mobilité est un défi pour nos politiques de transport et d’aménagement, mais également d’action sociale, de solidarité ou encore de développement économique. Car si la mobilité sous-entend le déplacement, qu’il soit physique, psychologique ou mental, elle ne se réduit pas au transport. Elle est, avant tout, un lien avec les compétences qui nécessitent pour les acquérir un apprentissage tout au long de la vie. Voilà pourquoi travailler à une mobilité plus inclusive nécessite une approche plus transversale de sa gouvernance pour qu’aucun territoire et ni aucune population ne soient laissés au bord du chemin.
D ans un monde globalisé où les populations bougent et bougeront de plus en plus, où les modes de vie se transforment en profondeur, la mobilité doit pouvoir prendre des formes nouvelles grâce à des offres de mobilité alternatives, multiples et collectives. Les Assises de la mobilité lancées en septembre 2017 par la ministre chargée des Transports, Élisabeth Borne, ont démontré, via la largesse des propositions avancées, qu’il est possible de répondre à ces enjeux nouveaux. Pour quel résultat ?
La Loi d’orientation des Mobilités issue des débats qui sera présentée au 2ème semestre 2018, permettra de mesurer l’ambition qu’ont les pouvoirs publics à répondre aux attentes des Français.
Quoiqu’il en soit, la mobilité de demain devra être multimodale, souple et adaptée aux besoins de chacun. Elle associera transports publics et privés. Si aujourd’hui, une tranche de la population seulement, la plus favorisée, est en mesure d’associer métro, bus, covoiturage, vélo … Demain ce seront les plus fragiles qui, grâce à un accompagnement personnalisé, seront en capacité de faire leurs choix. Cette nouvelle approche est porteuse de cohésion, de respect et de bienveillance, avec pour finalité une amélioration du vivre ensemble. N’oublions pas que tout le monde peut se retrouver en difficulté de mobilité à un moment de sa vie.

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Être tous mobiles, un enjeu pour les plus fragiles
Lire une carte, se repérer dans la ville, comprendre un réseau de transport, utiliser une application smartphone… nécessite des compétences et n’a rien d’inné. Les exemples de jeunes n’étant jamais sortis de leur quartier ou habitant sur le littoral mais n’ayant jamais vu la mer sont nombreux. Chez les seniors, prendre le bus suppose de savoir l’utiliser : disposer d’un titre de transport, choisir le meilleur itinéraire, savoir où se trouve le bon arrêt, se repérer sur le plan et dans la rue, connaître les horaires, ne pas laisser passer son arrêt… une véritable « mission de survie ». La mobilité relève ainsi de l’apprentissage, à tout âge et pour tous. Renforcer cet apprentissage et soutenir la professionnalisation des métiers de l’accompagnement à l’insertion socioprofessionnelle est indispensable.
Être tous mobiles, un enjeu d’apprentissage collectif
Pour s’en rendre compte, il faut imaginer ce que représenterait la vie quotidienne sans disposer de moyens de transport, sans savoir comment prévoir et organiser un déplacement, à qui faire appel pour être informé, accompagné, comment utiliser une application smartphone spécialisée. Une vie quotidienne amputée de capacités à se former, à se rendre à un emploi, à voir ses proches, à faire des courses, tout simplement à sortir de chez soi. Cette autonomie détermine l’insertion, le maintien dans la vie active et l’égalité des chances dans une société qui appelle à toujours plus de vitesse et d’agilité. Elle est aussi constitutive du bien vieillir.
Être tous mobiles, un enjeu territorial
Les questions de mobilité quotidienne se posent à l’échelle de bassins de vie et d’emploi, souvent en décalage avec l’organisation administrative de nos territoires. Les frontières administratives ne correspondent pas à nos territoires de vie réelle. Or, les politiques publiques de transport, d’action sociale, de solidarité, de développement économique et d’aménagement ont une application principalement locale.
Améliorer la coordination entre les nombreux acteurs impliqués – publics, privés, associatifs – est nécessaire.

Être tous mobiles, un enjeu économique
Le coût de la non-mobilité est autant humain qu’économique car le manque de mobilité accentue les vulnérabilités. Dans un contexte de chômage de masse, le fait que 2 employeurs sur 5 déclarent rencontrer des difficultés à pourvoir un poste pour des raisons de mobilité laisse songeur. Le doublement de la population des plus de 75 ans d’ici 2060 constitue par ailleurs une grande opportunité de création de services et d’emplois : maintien au domicile, développement de solutions de mobilité « inversée », en particulier dans les champs des services à la personne et du numérique.
Être tous mobiles, un enjeu d’égalité
Parce que les personnes en difficultés sociale et professionnelle ont moins de solutions de mobilité à leur disposition, la moitié d’entre elles n’ont pas le permis de conduire, deux tiers n’ont pas de véhicule, elles recourent à la marche et quand elles le peuvent, aux transports en commun. Reste que 28 % ne disposent aujourd’hui d’aucun moyen pour se déplacer.
Cette moindre mobilité est bien sûr liée à des vulnérabilités matérielles et économiques : disposer d’un véhicule, pouvoir acheter un abonnement de transports en commun, mais aussi à des vulnérabilités géographiques (déficit d’offre de mobilité, distance aux emplois moins qualifiés) ou encore sociales et organisationnelles (monoparentalité, emplois atypiques à horaires morcelés et/ou décalés).

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 Le 19 septembre dernier, Élisabeth Borne, ministre en charge des Transports,lançait les Assises nationales de la mobilité, socle de la future loi d’orientation des mobilités.
Ce grand débat national qui a rassemblé élus, associations professionnelles et syndicales, ONG, entreprises privées et grand public a eu pour objectif de faire émerger de nouvelles solutions de mobilités plus propres, plus autonomes, plus connectées et plus solidaires.
Prochaine étape : la loi d’orientation des mobilités qui sera discutée au 2ème semestre 2018.

La mobilité au cœur des engagements du président de la République
« Le combat que je souhaite engager pour les années à venir, c’est celui des transports du quotidien. La réponse aux défis de notre territoire n’est pas aujourd’hui d’aller promettre des TGV ou des aéroports de proximité à tous les chefs-lieux de département de France, mais c’est bien de repenser, de réarticuler les mobilités du XXIe siècle, la capacité à rejoindre le point le plus pertinent pour une ville qui n’est pas toujours la capitale. Ce qu’il nous faut penser, c’est autre chose pour demain ; ce sont les investissements pour ces nouvelles mobilités, c’est notre organisation collective pour ces nouvelles mobilités ; c’est les corrections à tous ces dysfonctionnements, ces engorgements qui aujourd’hui gâchent le quotidien de tant de nos concitoyens ».
Discours du Président de la République
Emmanuel Macron, Rennes, le 1er juillet
2017

Des grandes orientations et des défis à relever

Six groupes de travail, dont le LMI, ont réuni élus, experts, entreprises, administrations, acteurs de la mobilité, ONG, syndicats, avec pour mission de récolter des données et des témoignages et de formuler des recommandations pour faire évoluer les politiques publiques dans chacun de leur domaine. Ces quatre mois de débats, ont nourri le rapport du groupe de travail « mobilités solidaires » selon quatre orientations stratégiques :

Changer de paradigme, à savoir considérer la mobilité dans sa finalité d’accès aux services et aux activités afin de réduire les déplacements.

Mobiliser et faire confiance aux acteurs des territoires en créant des instances de dialogue et une animation de proximité pour favoriser les initiatives locales, citoyennes et les expérimentations sur la mobilité au sens large.

Faciliter l’accès de tous à la mobilité.
Le rapport propose d’aller vers une information « inclusive » sur les solutions de mobilité existantes. Cette information, doit être accessible à tous : numériquement mais aussi via des plateformes téléphoniques de services et des relais de proximité dans chaque bassin.

Cibler l’effort collectif de solidarité sur les publics et territoires plus fragiles.
Le rapport met l’accent sur l’aide à la transition et au déploiement d’offres alternatives en particulier pour les personnes et territoires les plus vulnérables, sur la nécessaire connectivité numérique mais également sur la coopération entre métropoles et territoires périurbains…

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Fondé en 2013 par Wimoov et Total, Le Laboratoire de la Mobilité inclusive associe de grands acteurs de la mobilité privés, publics et de la société civile, afin d’appréhender et d’analyser les difficultés rencontrées par les personnes les plus fragiles et de proposer des solutions au plus grand nombre. Sa vocation est à la fois de contribuer à des expérimentations locales et de soutenir le changement d’échelle des solutions de mobilité inclusive.
Il réunit à ce jour : Ademe, AG2R La Mondiale, Croix-Rouge Française, CGET (Commissariat général à l’égalité des territoires), Ecole d’urbanisme de Paris, DMML (Délégation Ministérielle des Missions Locales), FACE (Fondation Agir Contre l’Exclusion), FASTT (Fonds d’Action Sociale pour le Travail Temporaire), Fondation d’Entreprise Groupe MACIF, Fondation d’Entreprise Michelin, Fondation PSA, Keolis, groupe Mob’In, La Poste, Pôle Emploi, Secours Catholique, Total, Transdev, Wimoov. Les membres du Laboratoire s’inscrivent dans une volonté de faire et d’accompagner tous les acteurs qui souhaitent travailler à une mobilité plus inclusive.

Ses missions
RASSEMBLER
les acteurs publics, privés et la société civile, concernés par le sujet, pour réfléchir et partager des expériences concrètes, dans une démarche de coconstruction.
FAIRE ÉMERGER
le thème de l’accès à la mobilité dans le débat public.
FOURNIR
des données et analyses objectives pour développer une meilleure compréhension du frein que peut représenter la mobilité.
CONCEVOIR
des solutions de mobilité innovantes, accessibles à tous.

Les recommandations du LMI pour agir

Développer un véritable apprentissage de la mobilité en France. Parce qu’être mobile relève d’un ensemble de compétences et de savoir-faire mais également un d’accompagnement pour devenir autonome.

Simplifier, coordonner et rendre effectives les aides à la mobilité. Parce que la complexité des aides existantes en restreint l’accès.

Adapter les nouveaux services et les outils numériques. Parce ce que les innovations créent une nouvelle fracture. Nous appelons à la transformation numérique des institutions professionnelles et pour le grand public.

Promouvoir une nouvelle gouvernance de la mobilité inclusive. Parce que travailler à une mobilité plus inclusive nécessite de faciliter la collaboration transversale entre les acteurs des politiques publiques de transport, nous pensons qu’il faut améliorer la coordination, promouvoir une nouvelle gouvernance et tester de nouvelles modalités de collaboration.

Favoriser le développement des plates-formes de mobilité. Parce ce que les collectivités publiques tentent de réduire les fractures de mobilité sans toutefois y parvenir et parce que les plates-formes de mobilité ont démontré leur capacité à diagnostiquer les enjeux et à proposer des solutions efficaces.

Pour Valérie Dreyfuss, déléguée générale du LMI

« Faire émerger l’accès à la mobilité dans le débat public,
c’est une des prérogatives du Laboratoire de la Mobilité inclusive. »

Comment appréhendez-vous la mobilité ?

La mobilité est un ensemble de biens intermédiaires publics et privés que chacun utilise pour accéder aux ressources nécessaires à la satisfaction de ses besoins et à la réalisation de ses projets : le logement, l’emploi, la santé, les services publics et marchands. Ce sont donc les différences de potentiels de mobilités qui créent les inégalités sociales. En d’autres termes, sans moyens de se déplacer pour accéder à l’emploi, à la formation, aux commerces et aux services, ces populations ne pourront pas bénéficier des mêmes conditions d’existence et d’évolution sociale. Dans le même temps, le recul des services et des commerces de proximité dans les territoires périurbains et ruraux a aggravé la situation des personnes isolées et précaires pour qui c’est la double peine.

Vous venez de prendre vos fonctions de Déléguée générale, quelles orientations souhaitez-vous donner au Laboratoire ?

Les fractures sociales, territoriales, économiques, physiques, écologiques, générationnelles s’aggravent quand la mobilité et l’autonomie des individus sont menacées. C’est pourquoi, depuis sa création en 2013, le LMI défend une approche sociale de la mobilité portant son regard sur les populations les plus fragiles et propose des solutions pensées en priorité pour les plus fragiles à partir de travaux qui portent sur trois axes essentiels : le premier s’attache à mettre autour de la table un consortium d’acteurs majeurs, publics, privés, de la société civile qui couvrent toutes les facettes de la mobilité pour construire ensemble des dispositifs plus inclusifs. Le deuxième axe
porte sur l’écosystème créé autour de la mobilité inclusive. Car ne perdons pas de vue que la mobilité c’est aussi un levier de performance économique et sociale pour les entreprises notamment en termes d’emplois.
Enfin, nous nous attachons à faire émerger l’accès à la mobilité dans le débat public.

En tant que détachée de La Poste, quels sont les engagements du groupe en matière de mobilité ?

Bâtir une offre responsable et accessible à tous, contribuer au développement des territoires, participer à la transition énergétique, construire avec les acteurs des territoires de nouveaux services utiles et accessibles à tous, c’est dans l’ADN de La Poste. En acceptant de me détacher en mécénat de compétences sur le sujet de la mobilité, la direction de l’engagement sociétal de La Poste entend porter un regard plus inclusif sur ses actions de La Poste, en y intégrant les enjeux sociaux et environnementaux.

Le LMI a participé activement aux Assises de la mobilité. Quelles sont les grandes lignes de votre contribution ?

D’abord, il est urgent de replacer l’usager au centre de la réflexion pour mieux identifier ses problématiques. Ensuite, il faut investir sur
l’apprentissage de la mobilité tout au long de sa vie, c’est-à-dire apporter aux citoyens l’information et la pédagogie nécessaires pour
acquérir autonomie et liberté. Et sur les territoires en déficit de solutions de mobilité (notamment périurbains et ruraux mais
également urbains, villes moyennes, petites villes, périphérie des grandes villes), l’ensemble des acteurs publics, privés et citoyens doit être mobilisé en lien avec les AOM pour permettre l’émergence de solutions. Il est nécessaire également d’accompagner les publics dans l’accès à
l’information et de veiller à ce que les territoires bénéficient d’outils et de méthodologies permettant de réaliser un diagnostic exhaustif et précis de mobilité sur les territoires. Voilà quelques pistes.