[Interview] Yann Arnaud, Président du Conseil d’Orientation de la Communauté d’Intérêt Véhicule Automatisé (CIVA) – MOVIN’ON
La Communauté d’Intérêt Movin’On sur le Véhicule Automatisé, pilotée par la Macif, dévoile son Indice de Préparation des Territoires. Yann Arnaud, président du Conseil d’Orientation, explique comment cet outil novateur permet d’évaluer la capacité des collectivités à accueillir des solutions de transport automatisées.
LMI. Comment avez-vous construit l’indice de préparation des territoires ?
Yann Arnaud. L’indice de préparation des territoires a été conçu comme un outil d’évaluation complet pour mesurer la capacité des intercommunalités à intégrer des moyens de transport collectifs automatisés. Nous avons administré un questionnaire à 182 intercommunalités, soit 15 % des EPCI français, couvrant 91 départements. Cet outil repose sur cinq critères : les besoins en transport public, la connaissance des véhicules automatisés, l’intérêt pour les navettes automatisées, les ressources disponibles et les infrastructures existantes. Ces dimensions sont évaluées sur un total de 100 points, permettant de situer chaque territoire sur une échelle allant de « préparation initiale » à « préparation forte ». L’objectif est de fournir aux collectivités une vision claire de leur niveau de préparation et des actions prioritaires pour progresser.
Quelles sont les principales conclusions tirées de cet indice ?
YA. Le score moyen obtenu par les territoires interrogés est de 45/100, ce qui correspond à un niveau de préparation intermédiaire. Parmi les intercommunalités étudiées, 29 % sont en préparation modérée, 62 % en préparation intermédiaire, 8 % en préparation avancée et seulement 1 % en préparation forte.
Nous avons constaté que les territoires urbains sont mieux préparés que les territoires ruraux ou périurbains. Par exemple, les métropoles affichent un score moyen de 61,1/100, tandis que les communautés de communes périurbaines atteignent 40,9/100. Cela s’explique par des infrastructures mieux adaptées et une connaissance plus approfondie du cadre légal dans les zones urbaines.
En revanche, un autre enseignement majeur est le besoin important en transports publics, ce critère atteignant le score le plus important13,5/20. Ce qui reflète des lacunes dans l’offre de transport, notamment en termes de fréquence et de couverture.
À quoi sert l’indice de préparation ?
YA.L’indice de préparation est un outil essentiel pour les collectivités. Il leur permet d’abord, d’évaluer précisément leur niveau de préparation à la mobilité automatisée, ensuite, d’identifier les forces et les faiblesses de leur territoire, qu’il s’agisse des infrastructures, des ressources ou des connaissances et enfin, de prioriser leurs actions pour s’engager dans une transition vers des solutions de transport innovantes et adaptées. En somme, cet indice offre une feuille de route pour accompagner les collectivités dans le déploiement progressif des navettes automatisées.
Quels sont les principaux défis identifiés ?
YA. Le premier défi est lié au manque de connaissances. De nombreux élus et responsables locaux n’ont qu’une compréhension limitée des aspects légaux et techniques liés à la mobilité automatisée. Ce déficit freine leur capacité à planifier des projets concrets. Ensuite, les infrastructures sont insuffisantes dans de nombreux territoires. Les voies dédiées, la connectivité numérique et les aménagements routiers adaptés font défaut, en particulier dans les zones rurales. Enfin, les ressources humaines et financières varient considérablement d’un territoire à l’autre. Certaines intercommunalités manquent de personnel dédié et de financements, ce qui complique la mise en œuvre de ces projets.
Quels territoires sont les plus susceptibles d’adopter les navettes automatisées ?
YA. Les territoires urbains sont les mieux positionnés pour adopter les navettes automatisées, grâce à leurs infrastructures développées et une meilleure connaissance du sujet. En revanche, ce sont les territoires périurbains et ruraux, qui ont le plus de besoins en mobilité, mais selon l’indice, qui enregistrent aussi le plus de retard en termes de préparation. Cependant, ces territoires voient dans les navettes automatisées une solution pour désenclaver leur territoire. Avec un accompagnement adapté, ils pourraient progressivement combler leur retard et bénéficier de ces innovations et sortir ainsi la population, notamment âgée, de l’assignation à résidence.
Comment sensibiliser les élus et la population à la mobilité automatisée ?
YA. La sensibilisation passe par plusieurs étapes. Tout d’abord, il est crucial de développer des outils pédagogiques adaptés aux réalités locales, comme des fiches pratiques ou des démonstrations sur le terrain. Ensuite, organiser des expérimentations concrètes peut être un excellent moyen de montrer aux élus et aux habitants les avantages des navettes automatisées. Cela aide à lever les appréhensions et à renforcer leur acceptabilité. Enfin, mieux faire connaître et étoffer le centre de ressources partagées créé par les par les pouvoirs publics permettrait de simplifier les démarches et de faciliter l’accès à des solutions techniques, financières et réglementaires.
Quels résultats concrets espérez-vous avec cet indice ?
YA. Avec cet indice, nous espérons accélérer l’adoption des navettes automatisées dans les territoires français. Cela pourrait réduire les inégalités territoriales en matière de mobilité, en particulier dans les zones enclavées. Nous voulons également renforcer les liens entre les zones rurales et urbaines en proposant des solutions de transport adaptées, tout en réduisant l’impact environnemental lié à l’usage individuel de la voiture. En somme, cet indice est un outil stratégique pour accompagner les collectivités dans cette transition vers une mobilité durable et inclusive.
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