Associatif et mobilité à la campagne : « Je fais ma part ! » – par Philippe Gehin

Chronique de Philippe Gehin, Président de l’association Chèvre-Roche

« Je fais ma part ! »

Les associations subsistent à la campagne avec des fortunes et de ambitions diverses. Elles dépendent largement de leurs activités, donc du bénévolat ou des subventions qui les font vivre. Pour autant elles développent des objectifs ambitieux et agissent au même titre que (et parfois à la place) d’autres « institutions » réelles ou symboliques, actuelles ou déjà d’un autre temps : La commune, la paroisse, l’école, la société de chasse, le lavoir, l’épicerie, le bistrot…

L’association CHEVRE ROCHE compte une centaine d’adhérents dans et hors du village de Thuillières (Vosges) et de ses 120 habitants. Au cœur du réacteur, le bureau, composé de 7 personnes qui compte sur une vingtaine de bénévoles actifs et réguliers ; il prennent en charge la conception et l’animation d’un programme défini annuellement autour des objectifs suivants :

–         Tisser du lien social, c’est ici passer des sociabilités privées qui s’organisent entre pairs ayant des affinités, à des sociabilités publiques qui réunissent des personnes d’horizons différents mais ayant un ou plusieurs centres d’intérêts communs : manger ensemble, apprendre ensemble, agir ensemble…La récente situation sanitaire, liée à la pandémie de COVID-19, montre aussi que cet élargissement des sociabilités privées /publiques s’applique aussi aux solidarités entre les habitants du village (Cf texte 2 )

–         Développer la culture en milieu rural et développer des pratiques culturelles locales rendues accessibles parce qu’on est en confiance. C’est le premier cercle d’une « zone proximale de développement, culturel », une première marche d’éducation populaire.

–         Valoriser et enrôler les personnes pour leurs compétences à mettre en commun ou par leur capacité à entrer en apprentissage

–         Ouvrir sur l’extérieur, par des partenariats et l’accès aux infrastructures sportives ou culturelles des bourgs voisins, de l’intercommunalité et du département. Les habitants du monde rural ont besoin de sortir de leur « confinement » pour se former, étudier, s’ouvrir sur des modes de vie différents, s’élever dans l’échelle sociale et trouver sa place . « En sortir pour s’en sortir »…dit le chercheur . C’est heureusement, parfois, juste un détour pour y revenir.

–         Ouvrir à l’extérieur : L’association présente une vitrine qualitative de ce qui se passe au village en utilisant les médias et réseaux sociaux. Il s’agit d’en finir avec le surplomb que ces villes (parfois juste de modestes bourgs) exercent sur les populations à peine plus rurales qu’elles-mêmes. Cette ouverture à l’extérieur oriente la mobilité dans ce sens inattendu de la ville vers la campagne. C’est une porte ouverte, une invitation pour un soir, ou pour un mode de vie…

–         Promouvoir la campagne comme un environnement enviable pour les ruraux mais aussi pour les citadins et pas seulement en temps de confinement ! On peut, dans un premier temps, promouvoir les atouts du monde rural : l’oxygène, l’eau, l’espace disponible, la biodiversité et la nature proche. C’est aussi aussi l’immobilier moins cher, la proximité de presque tout pour peu qu’on accepte des temps de mobilité souvent plus courts que ceux consentis en ville. En un mot, la qualité de la vie. C’est enfin la créativité de ceux qui savent produire eux mêmes ( et donc moins consommer ! ) la nourriture, l’énergie, l’activité physique, la culture,…

L’image d’un village « qui bouge » n’est-il pas un bon indicateur de mobilité ? C’est rassurant et stimulant pour tous ceux qui y vivent et attractif pour les autres. A Thuillières, les bénévoles de l’association CHEVREROCHE sont les moteurs et les bénéficiaires de cette mobilité culturelle et sociale bien inclusive . Avec eux, c’est toute une commune qui tire parti de cette action associative facteur de développement local et d’ouverture sur le monde

Si nos objectifs sont ambitieux, nos actions associatives restent à la dimension de nos forces.

« Je fais ma part !» dit le colibri du conte. 

Philippe Gehin