Qu’est-ce qu’une approche sociale de la mobilité?
Trois questions à Nathalie Racineux, chargée d’études au département des Transitions Territoriales du Cerema Ouest.
Originale dans son approche, cette démarche qui tend à « une mobilité durable pour tous dans tous les territoires » est menée par le CEREMA OUEST avec la DREAL Pays de la Loire. A l’occasion des 5e Rencontres de la Mobilité inclusive qui se sont déroulées le 29 mai dernier, Nathalie Racineux a présenté la philosophie et les enjeux de cette démarche. Décryptage.
Pouvez-vous nous présenter l’origine et l’esprit de la démarche que vous menez avec la DREAL des Pays de la Loire ?
Cette démarche est issue d’une réflexion menée au sein de la DREAL Pays de la Loire sur le « management par et pour le développement durable » de laquelle est ressortie l’idée de réaliser une étude sur l’approche sociale de la mobilité dans les territoires peu denses. Il s’agissait aussi, plus largement de questionner la mobilité dans une logique de durabilité (sortir d’une approche sociale et catégorielle des plus fragiles, de la priorité donnée à l’emploi et considérer d’autres facteurs liés à la transition énergétique, à la rareté des ressources, à l’étalement urbain etc..)
Avec l’appui du Cerema, une étude participative a été lancée en 2015 intitulée « l’approche sociale de la mobilité » (ASM) réalisée par Indigo. Suite à un pré-diagnostic prospectif, deux ateliers collaboratifs réunissant des professionnels de la mobilité, de l’insertion, de l’action sociale et de l’aménagement (issus des collectivités, des services de l’Etat et d’associations) ont permis de dégager 3 enjeux transversaux, 4 défis et des pistes d’actions.
Quels sont les enjeux principaux ?
Les 3 enjeux identifiés sont l’apprentissage de la mobilité, la transversalité et coopération, l’essaimage des expériences. Et les 4 défis ressortis de ce travail sont les suivants :
• changer notre regard sur la vulnérabilité induite par la mobilité (sensibiliser, former les élus, les professionnels, rendre l’usager autonome de l’enfant au senior)
• prévenir les vulnérabilités (penser à d’autres modes d’organisation et d’aménagement des territoires pour limiter les déplacements motorisés individuels, développer la mixité fonctionnelle mais aussi des pratiques comme le télétravail..)
• accompagner les publics (informer, conseiller, faciliter l’accès aux services de mobilité, mais aussi sensibiliser aux modes doux, à l’apprentissage de nouveaux modes de transport partagés)
• coopérer pour un territoire moins vulnérable (décloisonner, mettre en réseau, valoriser, mutualiser les moyens entre territoires, construire de nouveaux partenariats, une nouvelle gouvernance pour une politique plus intégrée de la mobilité, s’appuyer aussi sur les initiatives citoyennes etc..).
L’idée est d’articuler un accompagnement des plus fragiles à la mobilité à un accompagnement de tous à des changements de représentations et de pratiques de mobilité en réponse aux enjeux écologiques.Cette réflexion s’est poursuivie par la création d’un réseau régional des acteurs de la mobilité durable fin 2016 pour capitaliser les expériences et favoriser l’essaimage dans les territoires, contribuer à l’articulation des cultures professionnelles autour de la mobilité. En 2017, un groupe de travail a été mis en place pour sensibiliser les acteurs des territoires à la mobilité durable pour tous, favoriser l’émergence de projets, de nouveaux services à la mobilité mais aussi des rapprochements d’acteurs, des partenariats inédits. Chaque membre est invité à « faire un pas de côté » par rapport à son cœur de métier pour diffuser des messages, jouer le rôle d’ambassadeurs de la mobilité durable. Pour ce faire, des ressources sont mises en partage, des leviers d’actions sont identifiés, des argumentaires sont construits de manière collective. Cette animation territoriale a vocation à s’inscrire dans le temps.
Comment peut-on dupliquer cette démarche ?
Cette démarche peut tout à fait être menée dans d’autres territoires, à différentes échelles à l’initiative d’un service déconcentré de l’Etat comme une DREAL ou une DDT, Elle peut aussi émaner d’autres acteurs (collectivités, associations) qui partagent un même besoin d’échanger leurs expériences et pratiques professionnelles pour agir ensemble, mutualiser, croiser des savoirs, expérimenter de nouvelles solutions de manière collective ; chacun apportant sa contribution là où il se situe. On sait que les réseaux sont des outils privilégiés pour essaimer.