6es RMI – Territoires Ruraux : quel état des lieux, quels enjeux ?

22 millions de Français (un tiers de la population française), vivent dans un territoire rural. Quel est état des lieux de la ruralité en France, quels sont les enjeux ? Éléments de réponse avec Cédric Szabo, Directeur de l’Association des Maires Ruraux de France (AMRF).
Il y a un an, lors du grand débat national, nos responsables nationaux ont remis une contribution involontaire, celles de toutes les personnes invitées à s’exprimer en mairie. Le constat qui est ressorti de tous ces témoignages est celui d’un quotidien marqué par la question de la mobilité, ou plus exactement de la non-mobilité.
Cédric Szabo, Directeur de l’Association des Maires Ruraux de France
A l’occasion de son intervention aux 6es Rencontres de la Mobilité inclusive, Le directeur de l’AMRF a par ailleurs dressé un état des lieux de la ruralité, estimant que « le principal enjeu des territoires ruraux est de se faire connaître des acteurs de la mobilité ».
Mobilité : les maires en première ligne
Le 14 janvier 2019, l’AMRF, qui fédère près de 10 000 maires publiait son cahier de doléances intitulé « la parole aux citoyens : les maires ont la clé« . Des milliers de doléances et de propositions ont été recueillies dans le cadre du grand débat. La question de la mobilité s’est inscrite cœur de tous ces échanges. « Il se matérialise un sentiment d’injustice concernant les transports et la mobilité (peu d’alternatives offertes à la voiture en milieu rural, peu de prise en compte du territoire, culpabilisation de l’automobiliste pollueur alors même que l’offre de transports publics diminue et que les gares ferment, impact différencié des taxes, coût de la mobilité », peut-on lire dans ce cahier de doléances, qui précise que « deux points phares sont abordés dans l’ensemble des témoignages : la taxe sur les carburants et l’abaissement de la vitesse à 80km/h. L’appel à un développement des transports publics, des lignes ferroviaires secondaires, de l’offre de transports en commun figure également en tête de peloton parmi les revendications ».
Un agenda rural
Dans ce même rapport, l’AMRF demandait au gouvernement d’établir un agenda rural afin d’inscrire les besoins spécifiques en zones rurales. Cet agenda rural a été présenté par le Premier ministre Édouard Philippe, lors du congrès de l’Association des Maires Ruraux de France du 20 septembre 2019.
Pour quelles avancées ?
Pour Cédric Szabo, le travail de L’AMRF consiste maintenant à « suivre l’avancée des engagements pris » :
Le Président a demandé la mise en place d’un agenda rural, et a déclaré qu’aucun habitant du territoire ne devait se trouver à plus de trente minutes d’un service public. Cependant, nous en sommes toujours au début des travaux, et nous éprouvons une réelle difficulté à faire comprendre la gravité de la situation.
Nous devons faire un appel à la responsabilité de tous. À ce jour, les élus ont un rôle à jouer, mais de nombreux acteurs tentent également de mettre en place des solutions, sans disposer des ressources suffisantes. Les populations rurales doivent donc être considérées de manière équitable, et nous devons donner aux acteurs locaux les moyens d’agir. Nous devons également nous interroger sur la relocalisation de l’emploi. À la veille des élections municipales, la mobilité est au cœur des préoccupations des élus municipaux.
Pour aller plus loin : 3 questions à Cédric Szabo
Quel est le quotidien des 22 millions de personnes qui vivent dans les territoires ruraux ?
Tous vivent la mobilité comme une contrainte et bon nombre d’entre eux restent dépendants de la voiture individuelle pour accéder à la santé, à l’éducation, à l’emploi ou à la culture. On peut clairement parler de mise à distance. Il ne se passe pas une journée où un rural ne se pose pas la question de la mobilité.
Vous estimez que les populations sont moins bien traitées dans les zones rurales ?
Clairement oui. En témoigne le déploiement des lignes SNCF sur les 50 dernières années. On a privilégié les habitants des métropoles et mis largement en second rang les zones rurales en fermant des gares et des lignes. Cette hiérarchisation dans la qualité des traitements a un prix, celui de l’isolement.
Va-t-on désormais vers un équilibre plus égalitaire ?
Dans les verbes oui dans les actes clairement non. Prenons l’exemple des maisons de services de l’État, soit 1200 maisons pour 36 000 communes. Le ratio est faible, soit une maison pour 25 communes, qui ne génère pas de la proximité, mais de la mobilité contrainte. Quant à la loi LOM, elle est un festival de bonnes idées, mais sans aucun outil de rééquilibrage en matière de financement. Car dans les métropoles, les acteurs du transport sont grassement financés par l’État, alors que dans les zones rurales il n’existe pas d’équivalent.
Pourtant, les solutions en matière de mobilité dans les zones rurales, on les connait. La question cruciale reste comment les finance-t-on ? Car il n’existe, pour l’heure, aucun modèle économique. C’est pourquoi nous demandons un aménagement de l’ensemble du territoire plus équilibré et plus équitable pour agir vite car l’enjeu environnemental est de taille.